Paul
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Posté le: Dim Juin 27, 2010 12:01 pm Sujet du message: 1918/19 - Guerre ukraino-polonaise - résumé des opérations |
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On peut ainsi brièvement résumer les quatre phases des combats qui ont opposé les forces de la République Populaire d'Ukraine Occidentale (ZUNR et son armée l’UHA) à celles de la Pologne au cours des années 1918-1919.
I. Combat pour Lviv/Lwów (1er novembre 1918 – 22 novembre 1918)
II. Stabilisation de la ligne de front (décembre 1918 – janvier 1919)
III. Combats pour obtenir l’initiative stratégique (février – avril 1919)
IV. Retraite de l’Armée Galicienne (mai – juillet 1919)
1. Lviv/Lwów
Effectifs des forces en présence à la fin des combats (22/11/1919) :
Galiciens = 4.700 hommes, Polonais = 6.700 hommes (480 morts dont 120 collégiens, les 'Aiglons', et 76 étudiants universitaires)
Du 1er au 4 novembre, à la suite du soulèvement galicien qui fut la conséquence de la chute de l’empire austro-hongrois, les autorités ukrainiennes de Galicie proclamèrent la République Populaire d’Ukraine Occidentale (ZUNR) avec L’viv pour capitale. Ceci provoqua un contre-soulèvement polonais, ces derniers étaient majoritaires dans la ville (51,5% des habitants pour 17% d'Ukrainiens). Des combats de rues se produisirent bientôt. Les forces polonaises, dont un grand nombre de civils armés, tenaient le sud-ouest de la ville. Profitant de la faiblesse de la garnison ukrainienne, elles s’emparèrent de la station de tram, de l’Ecole des Cadets et de plusieurs autres points importants.
L’arrivée de soldats ukrainiens qui avaient été enrôlés dans l’armée austro-hongroise ainsi que la Légion ukrainienne (USS) revenant de Bukovyne, permit de reprendre l’initiative.
Du 5 au 20 novembre, de féroces combats opposèrent les forces en présence. Plusieurs points stratégiques furent pris et repris. Mais les soldats ukrainiens, plus habitués à la guerre de tranchées qu’aux combats de rues, étaient mal à l’aise dans ce type d’affrontement.
Les 20 et 21 novembre, des renforts polonais, renversant le rapport de force, attaquent par le nord et le sud de la ville. L’avance polonaise est stoppée au nord mais, au sud, les Ukrainiens doivent retraiter. Malgré de fortes positions toujours tenues dans le centre, le commandement donna l’ordre de quitter la ville dans la nuit du 21 au 22 novembre.
En novembre-décembre 1918, l’Armée Ukrainienne de Galicie (UHA) était organisée sur la base de groupes opérationnels indépendants qui avaient pour bases les districts administratifs. Elle s’étendait sur une ligne de front stabilisée autour de Lviv. Après des combats désespérés, les troupes ukrainiennes de la garnison de Przemysl durent se rendre.
L’UGA comptait alors approximativement 15.000 hommes en ligne et 40 pièces d’artillerie. Les Polonais avaient alors 12.500 hommes et 48 pièces d’artilleries
L’Armée galicienne souffrait de trois carences graves qu’il fut impossible de surmonter. Les officiers manquaient cruellement et le courage ne pouvait tout suppléer face à des chefs militaires polonais instruits et expérimentés. Si l’artillerie était de qualité, l’approvisionnement en munition pour les armes légères était défaillant car les stocks austro-hongrois capturés étaient limités.
Ceci rendait l’infanterie plus apte à la défense qu’à l’offensive qu’elle devait trop souvent, pour une guerre moderne, mener à la baïonnette. Finalement, la cavalerie était pratiquement inexistante, en tout cas trop peu nombreuse pour remplir son rôle d’unité de reconnaissance ou de poursuite en cas de succès.
2. Siège de Lviv/Lwów et région limitrophe
Du 27 décembre 1918 au 2 janvier 1919, assaut de la ville qui échoue finalement à cause du manque de réserves disponibles et de l’action inconsidérée de la Brigade de Kozatyn envoyée en renfort par l’UNR (Ukraine de Petlioura).
Les 10 et 11 janvier 1919, le groupement militaire polonais « Bug » rompt le front ukrainien et atteint L’viv, y amenant des renforts, de l’artillerie et du ravitaillement.
Le 11 janvier 1919, cinq Brigades de l’UGA (environ 6.000 hommes) attaquent Lviv. Leur artillerie lourde pilonne les positions polonaises. La ville est privée d’eau, d’électricité et de chauffage.
3. Ukraine occidentale
Le 17 février 1919, l’UGA, réorganisée en 3 Corps d’environ 15.000 hommes chacun, lance une offensive générale sur un front de 250 Km de Holm à Hyriv dans le but de couper la ligne de chemin de fer qui permettait le ravitaillement de la ville et ainsi de l’obliger à se rendre.
Les 7 et 8 mars 1919, attaque ukrainienne qui perce les lignes polonaises à Vovchuhiv, avance jusqu’à Horodok et Sudova Vychnia et parvient à couper la ligne de chemin de fer.
La situation dans la ville est telle, que certains officiers polonais, jugeant la situation désespérée, envisagent de l’évacuer.
Les 24, 25 et 26 mars 1919, contre offensive polonaise qui reprend le contrôle de la ligne de chemin de fer.
4. Lviv/Lwów et Ukraine occidentale
Les 14 et 15 avril 1919, nouvelle poussée de l’armée polonaise qui oblige les forces de l’UGA à reculer de 5 km sur de nouvelles positions autour de la ville.
Avril 1919, l’armée Haller, formée en France, équipée et encadrée par des officiers et sous-officiers français arrive en Volhynie et au nord de la Galicie. Bien que les conditions posées par l’Entente étaient de ne l’employer que contre les Bolcheviks, une partie importante est cependant employée contre l’UGA. Cette dernière se trouve brusquement en état d’infériorité tant du point de vue numérique (45 à 50.000 combattants en ligne) que du matériel.
14 mai 1919, grande offensive polonaise sur les flancs du front ukrainien. Les 1er et 3e Corps Galiciens doivent retraiter.
24 mai 1919, en accord avec le commandement polonais, offensive des troupes roumaines depuis le sud vers Kolomyia
6 juin 1919, contre-offensive désespérée du 2e Corps de l'UHA, toujours intact, qui parvient à percer le front polonais à Chortkiv.
15 juin 1919, l’UHA reprend Ternopil, l’ancienne capitale provisoire.
15 au 17 juin 1919, offensive générale de l’UHA qui repousse les Polonais vers l’ouest à 50 à 60 Km de leurs lignes (120 km en un point).
Un désastreux manque de munition (chaque soldat n’avaient plus, en moyenne, que 4 ou 5 cartouches), mal chronique depuis l’occupation par les Polonais de la zone frontière tchécoslovaque par où arrivaient les fournitures pour les armes d’origine autrichiennes (armes légère et artillerie de campagne), met un point final à ce « baroud d’honneur » et oblige à une retraite stratégique.
Après avoir traversé le Zbrutch le 17 juillet 1919, l’UHA quitte l’Ukraine occidentale et rejoint l’UNR (Ukraine "du Dnipro").
L’UHA devaient donc palier un manque flagrant d’officiers instruits, principalement à l’Etat-major et les quelques officiers supérieurs ukrainiens firent appel à leurs collègues autrichiens : la bonne volonté et le courage ne suffisaient pas face à des Généraux et des officiers supérieurs polonais pour la plupart officiers de carrière.
Une camaraderie certaine était née entre officiers ukrainiens qui avaient combattu notamment en Italie au cours de la Première Guerre et leurs homologues autrichiens, d’autant que beaucoup avait eu des Ukrainiens de Galicie sous leurs ordres. L’un d’entre eux était même un Habsbourg : le Colonel Wilhelm (Vassil) von Habsburg-Lottringen.
Parmi les officiers de haut rang de l’UHA, huit furent nommés Général. Six d’entre eux étaient de nationalité ukrainienne, plus un Galicien né en Allemagne et un Hongrois. Trois d’entre eux avaient servi dans l’Armée impériale russe et cinq avec les Austro-Hongrois.
Leurs noms sont Olexander Hrekov, Mykola Hembatchov, Anton Kraus, Viktor Kurmanovytch, Osyp Mykytka, Mykhaïlo Omelianovytch-Pavlenko, Myron Tarnavsky et Gustav Ziriz. De plus, le Colonel Arnold Wolf, officier autrichien, fut promu au grade de Général en Tchécoslovaquie en 1920 après qu’il soit parvenu à faire passer la frontière de ce pays à sa brigade en rompant le front polonais.
Pour éviter toute confusion, remarquons que le grade de Otaman était attribué aux officiers généraux en Ukraine « du Dnipro » alors qu’en Galicie, il correspondait à celui de Major (chef de bataillon).
En contraste avec la brutalité généralisée des affrontements qui se sont déroulés dans les anciennes parties de l’Empire russe, la guerre polono-ukrainienne de Galicie fut conduite, des deux côtés, par des troupes disciplinées et bien entraînées et encadrées.
Si les combats furent féroces et les pertes sensibles, comme dans toutes les guerres (les attaques de nuit à la baïonnette par les Ukrainiens étaient redoutées par les Polonais), de nombreux cessez-le-feu furent négociés entre les parties pour relever les blessés et les morts. Certains furent même prolongés à l’occasion. Ainsi, on signale un épisode plutôt cocasse lors du siège de L’viv : une trêve de durée déterminée eut lieu sur un secteur du front pour permettre l’enlèvement des blessés. Au cours de celle-ci, des officiers ukrainiens se rendirent dans les lignes ennemies à l’invitation de leurs collègues polonais. Alors que le temps était écoulé, il fut impossible à un officier ukrainien de rejoindre ses troupes tellement la rencontre avait été arrosée. Une nouvelle trêve entra immédiatement en vigueur pour permettre à cet officier de rejoindre ses lignes.
On compte un nombre de morts civils relativement peu important ainsi que peu de destructions, même dans la ville de L’viv pourtant soumise à un siège de plusieurs mois : les objectifs stratégiques étaient seuls visés lors des bombardements.
Approximativement 15.000 Galiciens et 10.000 Polonais, principalement des soldats, sont tombés au cours de cette guerre de 8 mois et demi.
OBS : Dans ce texte on parle souvent de front. Compte tenu des faibles effectifs en présence, il ne pouvait s'assimiler aux lignes de tranchées continues qu'a connu le front occidental au cours de la Première Guerre.
Le front consistait ici en une suite de points clés comme des localités, des ponts, des embranchement ferroviaires, des noeuds routiers ... qu'il fallait tenir pour éviter que l'ennemi ne puisse en profiter pour se déplacer, se ravitailler ou contrôler les mouvements des adversaires.
De nombreux livres parurent dans l'entre-deux-guerres pour décrire les détails des opérations de cette guerre. Si des auteurs sont Polonais, de nombreux Ukrainiens ont également écrit. Ces derniers publièrent très souvent leurs études en ukrainien dans la ville de Lwow / L'viv. |
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